[Dossier de veille] La recharge électrique

Il y a presque un an, nous avions consacré notre revue de presse à la recharge des véhicules électriques (voir ici notre article). Depuis, la technologie a évolué, les usages ont été modifiés et le marché de l’automobile a connu une période difficile. Il est donc temps de refaire un point sur cette problématique cruciale pour l’avenir de la mobilité bas carbone.

Où en est-on aujourd’hui ? Quelques chiffres

En 2020, le marché automobile français a été fortement impacté par la crise sanitaire : le nombre d’immatriculations et de commandes a baissé de 25,5% sur toute l’année pour les voitures particulières (chiffres du Comité des Constructeurs Français d’Automobile). Cependant, les ventes de véhicules hybrides et électriques ont continué leur progression. En effet, sous l’effet des nouvelles réglementations, l’année 2020 a été marquée par une progression de 180% des immatriculations de véhicules électriques et hybrides rechargeables. Près de 195 000 véhicules électriques et hybrides rechargeables ont été immatriculés en 2020, soit 125 000 de plus qu’en 2019. En décembre 2020, les véhicules électriques et hybrides rechargeables ont représenté plus de 16 % du marché français. Aujourd’hui le cumul de parc roulant électrifié de véhicules légers est d’environ 470 000 véhicules. L’objectif du contrat stratégique de la filière est d’atteindre le million (en cumulé) de véhicules électriques ou hybrides rechargeables en 2022 en France. L’objectif de la commission européenne est lui d’au moins 30 millions de véhicules à zéro émission sur les routes européennes à l’horizon 2030.

Parallèlement à ce développement, il semblerait que le nombre de points de recharge n’augmente pas aussi rapidement. La France comptabilisait 30 838 points de recharge fin décembre 2020, l’objectif du contrat stratégique de filière étant de 100 000 points à la fin de l’année 2021. Au total, on comptait 271 337 points de recharge installés en Europe à fin octobre 2020, l’objectif de la commission européenne étant de 3 millions de bornes à l’horizon 2030. Si le nombre de ces bornes sur le territoire français est en constante augmentation depuis quelques années (entre 2015 et 2019 il a en effet été multiplié par trois et a augmenté de 15 % entre 2019 et 2020), il n’a que très peu progressé au cours de l’année 2020. La cause est en partie la crise sanitaire, mais également une correction de la base de données précédente : certaines stations disposant de plusieurs types de connecteurs déclaraient deux à trois points de recharge différents alors qu’il ne s’agissait en réalité que d’une seule et même borne. 2020 a également été marquée par la fermeture de certains réseaux, tels que Bluely (à Lyon) et Bluecub (à Bordeaux), soit 868 points de recharge en moins. Selon l’AVERE, le nombre de points de recharge stagne, la dynamique doit être relancée, l’objectif du gouvernement de 100 000 points de recharge à fin 2021 va nécessiter la mobilisation de tous les outils existants, tant financiers que législatifs, pour être atteint.

Du point de vue des utilisateurs, selon une étude menée par IPSOS et Avere France auprès d’utilisateurs de véhicules électriques (VE) et hybrides rechargeables (VHR), 68% d’entre eux se déclarent aujourd’hui insatisfaits des bornes de recharge en voirie (trop souvent en panne ou utilisées par d’autres voitures pour se garer) et 2/3 d’entre eux estiment qu’il est essentiel d’augmenter le nombre de bornes de recharge.

Les 3 axes d’amélioration pour faciliter le déploiement des véhicules électriques sont donc le temps de recharge, le nombre et la localisation des points de recharge et la technologie Vehicle to Grid (V2G), où les véhicules rechargeables peuvent redistribuer de l’énergie électrique dans le réseau.

Axe 1 : Le temps de recharge

© Destina – Fotolia.com

Le temps de recharge peut être un facteur limitant au développement des véhicules électriques : s’il ne faut que quelques minutes pour faire le plein d’une voiture essence ou diesel, c’est pour le moment beaucoup plus long pour la recharge d’un véhicule électrique. Le site d’EDF indique que « Le temps de recharge d’une voiture électrique dépend de plusieurs facteurs : le modèle du véhicule, la capacité de sa batterie, la puissance de la borne de recharge utilisée et enfin l’état de charge de la batterie. Le temps de charge peut ainsi varier de 15 minutes à plusieurs heures. ». Les ordres de grandeur sont les suivants :

 

  • A domicile il existe 2 options possibles
    • Recharge sur prise : il est recommandé de se recharger sur une prise spécifique, le courant est alors limité de 10 à 14A selon les cordons. A 14 A, le temps de charge d’une voiture électrique de dernière génération comportant une batterie de 50 kWh sera de 15h (pour une charge complète)
    • Recharge avec « wallbox » : il s’agit d’une borne murale installée à domicile, avec des puissances de 3,7 kW, 7,4 kW ou – très rarement à domicile, de 22 kW (triphasé). Fixée au mur du garage, une wallbox de 7,4 kW permet de diviser par deux le temps de charge de la voiture électrique, pour atteindre 4 heures (pour une batterie de 22 kWh) ou 7 heures (pour 50 kWh).
  • Bornes de recharge publiques selon leurs capacités, les bornes de recharge publiques ont les mêmes capacités qu’une wallbox, soit un temps divisé par 2 ou 3 par rapport à une prise domestique renforcée ;
  • Sur l’autoroute ou sur les stations de charge rapide ou de forte puissance, les bornes de recharge rapide pour voitures électriques chargent 80 % de la batterie en 20 minutes.

Le temps de recharge des batteries est donc un axe d’amélioration pour le développement des véhicules électriques. On assiste actuellement à une course dans le domaine : c’est à qui annoncera le temps de recharge le plus court. StoreDot, une entreprise israélienne, annonce avoir développé une batterie de voiture électrique capable de se recharger intégralement en l’espace de 5 minutes. Le nouveau chargeur intégré de Hyundai permettrait d’effectuer une recharge complète de la batterie en seulement 18 minutes et d’augmenter l’autonomie de 100 km en seulement 5 minutes. Toyota préparerait un véhicule électrique équipé d’une batterie à semi-conducteurs, qui permettrait d’avoir 500 km d’autonomie avec une charge de 10 minutes. Pour diminuer le temps passé à la recharge pour l’utilisateur, une autre stratégie est de proposer l’échange de batteries. C’est la solution mise en place à Pékin pour les taxis : la ville a planifié de remplacer l’intégralité de ses 70.000 taxis par des modèles électriques avec 300 stations d’échange de batterie prévoyant un temps record de 3 minutes pour effectuer l’échange des packs sans que les occupants n’aient à descendre du véhicule. Pour le moment, seules 90 stations ont été mises en service. Le constructeur chinois de voitures électriques Nio a présenté la nouvelle génération de sa station d’échanges de batteries, avec une capacité quotidienne multipliée par 3. Cependant cette solution a été abandonnée en 2013 par Renault qui s’était associée à une startup Israelienne (Better Place) proposant des stations d’échange de batteries : le modèle économique n’a pas fonctionné. A l’époque, le PDG de Renault avait indiqué que « les batteries interchangeables ne sont plus la principale orientation pour les véhicules électriques. La tendance et la demande vont vers des batteries standards intégrées à plat sous le châssis ».

Axe 2 : nombre et localisation des points de recharge

Parallèlement à la diminution du temps de recharge, la diversification de la localisation des bornes de recharge et leur facilité d’utilisation sont également cruciales : elles doivent être plus nombreuses et localisées judicieusement de manière à éviter les zones blanches et augmenter leur praticité. On voit apparaître des solutions de recharge de batteries dans les parkings, les copropriétés, les propriétés privées, les stations-services, et même sur les infrastructures des villes :

Axe 3 : V2G :

Comme signalé dans notre article de l’année dernière, la technologie Vehicle to Grid (V2G), où les véhicules rechargeables peuvent redistribuer de l’énergie électrique dans le réseau, pourrait également contribuer à l’équilibre global. A ce sujet, Enedis a publié en décembre dernier un rapport sur le pilotage de la recharge des véhicules électriques. Selon cette étude, le pilotage offre des opportunités d’économie au « consom’acteur » pouvant aller jusqu’à 90€/an par véhicule électrique, et, à moyen terme, le pilotage de la recharge permettra également de participer à la bonne intégration du véhicule électrique au sein du réseau de distribution.

Volkswagen, Audi et Renault annoncent travailler sur la problématique de la charge bidirectionnelle.

Stratégie

La tendance stratégique actuelle sur le marché est plutôt à la mise en place de partenariats entre constructeurs automobile et fournisseurs de points de recharge. On peut citer entre autres :

A noter qu’un décret publié en 2017 en France impose l’interopérabilité des systèmes de recharge.

Conclusion : apport de Carnauto

Plusieurs partenaires de la filière Carnauto, dédiée à la mobilité terrestre, travaillent sur différents axes de développement afin d’optimiser la recharge des batteries. On peut citer par exemple :

Enfin, l’IFPEN a collaboré avec l’Academy of Chinese Energy Strategy (CUP-Beijing) pour développer un modèle d’optimisation de l’implantation des stations de recharge.

C Chagny pour Carnauto

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Electric Charging Station by Viktor Ostrovsky from the Noun Project

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